Open Spaces (1)

10h05.

- Alors, pour vos congés, démerdez-vous !

Ces mots fatidiques prononcés, notre manager s’éloigne de sa démarche chaloupée pour entretenir comme il se doit sa mauvaise haleine grâce à sa troisième pause café-clope de sa pourtant bien courte matinée.

Et la foire d’empoigne commence.

- Il me faut au moins trois semaines en Août ! Déclare Laurence, péremptoire, en redressant avec une précision chirurgical son affreux serre-tête de velours vert ce qui trahit chez elle résolution et combativité.

- Moi aussi! Moi aussi ! Panique Farid, sautillant sur place comme un parieur surexcité devant une course de chevaux.

Annabelle, anguille furtive, s’est faufilée jusqu’au grand calendrier cartonné et emparée de l’unique Velleda doté d’encore un peu de jus.

- On va faire ça calmement, sinon on s’en sortira pas! Je vais les noter.

Le brouhaha baisse d’un cran à peine. Je peux vous garantir qu’aucun atelier de conception ne voit mes collègues plus passionnés qu’ils ne le sont en cet instant.

Annabelle hausse le ton, jouant la maîtresse d’école :

- Chut !!! Du calme ! S’il-vous plaît ! S’IL VOUS PLAIT !!! Qui à des dates impératives déjà connues ?

- Quoi ? S’étonne Soraya, ouvrant deux châsses de merlan frit, les sourcils lancés à la conquête du haut de son front.

Cette fille a vraiment une tête de cartoon.

- Hein ? Demande Antoine.

Lui, au contraire fronce ses sourcils broussailleux comme si cela pouvait améliorer son audition.

- Que dice ? Grogne de sa voix rauque Felipe, notre prestataire Mexicain.